Sunday, 9 February , 2025

Suzanne Lacascade : L'Éclat d'une Plume Antillaise Longtemps Eclipsée


Suzanne Lacascade : L'Éclat d'une Plume Antillaise Longtemps Eclipsée
192 vues

whatsapp

Suzanne Lacascade, une figure méconnue de la littérature antillaise, émerge du passé pour révéler son histoire singulière, un parcours longtemps éclipsé par le racisme et le machisme de l'époque. Née à Fort-de-France le 31 mars 1884 (Martinique), fille d'Étienne Lacascade, un notable guadeloupéen qui fut médecin militaire, député, et gouverneur de Mayotte, Suzanne se dresse telle une énigme dont les contours se dessinent au fil des décennies.

En 1924, Suzanne Lacascade réalise un exploit pour une Antillaise de l'époque en publiant son unique roman, "Claire-Solange, âme africaine". Cet ouvrage, salué par le prix Montyon de l'Académie française en 1925, narre les tribulations d'une jeune mulâtresse qui quitte les Antilles en 1914 pour rejoindre son père en métropole, une époque où le racisme et le machisme imprègnent profondément la société française.

Entre 1925 et 1977, Suzanne Lacascade demeure dans l'ombre, jusqu'à ce que Maryse Condé, une éminente écrivaine antillaise, la ressuscite en l'intégrant à son enseignement. Pour M. Condé, "Claire-Solange, âme africaine" représente la première tentative littéraire d'une femme de couleur antillaise pour développer des qualités originales, malgré les nuances colonialistes du récit. La redécouverte du roman n'intervient qu'en 2019 grâce à sa réédition par les éditions Long Cours en Guadeloupe.

Bien que Suzanne Lacascade n'apparaisse pas parmi les pionniers de la négritude, son roman présente des aspects précurseurs. Il s'agit de la première publication en France d'une Antillaise noire, mettant en scène un personnage principal féminin non blanc, une audace inédite à l'époque. À travers le regard de Claire-Solange, Lacascade livre une critique des systèmes de domination, dénonçant l'oppression des femmes et des Noirs tout en revendiquant fièrement ses origines africaines, et introduit même des phrases en créole.

Des zones d'ombre persistent dans la vie de Suzanne Lacascade. Selon certaines sources, elle aurait enseigné et fondé le cours privé Lacascade à Paris dans les années 30. Son décès à Paris le 28 janvier 1966, dans l'anonymat total, souligne que la publication d'un roman n'a pas suffi à inscrire son nom dans l'histoire. Le mystère qui entoure sa vie est si dense que des chercheurs ont remis en question son existence même.

Maryse Condé, dans les années 1970, la réhabilite en la considérant comme une précurseure de la négritude et de l'intersectionnalité. Ainsi, Suzanne Lacascade, à travers son unique roman, émerge enfin de l'obscurité pour prendre sa place dans le panorama littéraire antillais.

Veuillez vous connecter ou créer un compte pour commenter cet article.

Articles dans la même catégorie